mardi 27 mars 2012

La Profession de Foi (Ibn Arabi) 3

... IL donne la royauté à qui Il veut et Il enlève la royauté à qui Il veut, et Il élève qui Il veut et Il abaisse qui Il veut. Il guide qui Il veut et Il égare qui Il veut. Ce que DIEU a voulu a été et ce que DIEU n'a pas voulu qu'il fût ne sera pas. Si toutes les créatures s'unissaient pour vouloir une chose que DIEU n'a pas voulu qu'elles voulussent, elles ne la voudraient pas, ou pour faire une chose que DIEU n'a pas voulu faire exister - et qu'elles auraient voulue, alors que DIEU a voulu qu'elles ne la voulussent pas -, elles ne la voudraient pas et ne la pourraient pas et Il ne leur en donnerait pas le pouvoir.
L’infidélité et la foi, l'obéissance et la désobéissance (dépendent) de Sa Volonté créatrice, de Sa Volonté normative et de Sa Décision. Il n'a cessé - Gloire à LUI ! - d'avoir l'attribut de cette volonté, alors que le Monde était replié dans le non-manifesté à l'état de néant, non existant, bien qu'immuable dans Sa Science - Gloire à LUI !...
... Celui qui en tout cela, lui attribut des modalités, ne professe pas Son Unité. Celui qui Lui donne des représentations, n'atteint pas Sa véritable nature (haqîqa). Celui qui Le compare, ce n'est pas LUI qu'il désigne. Celui qui Le détermine et Le conçoit en imagination, ne professe pas Son Impénétrabilité. Agissant sans avoir besoin d'un instrument, prédestinant sans parcourir les possibles par la pensée, riche sans acquisition. Les divisions du temps ne LUI sont pas concomitantes, et les instruments ne sont pas Ses assistants. Son être a précédé les divisions du temps, Son existence a précédé le néant, et Son éternité, a précédé le commencement. Par le fait qu'Il a donné la conscience aux organes des sens, l'on sait que LUI même est dépourvu de tels organes. Par le fait qu'Il a donné à (toutes) les choses leurs contraires, l'on sait que Lui-même n'a pas de contraire; et par le fait qu'Il a disposé (toutes) les choses par couples, l'on sait qu'Il n'a pas de compagnon. Il a fait contraster les ténèbres avec la lumière, l'obscurité avec l'évidence, l'humidité avec la sécheresse, le froid intense avec la chaleur ardente. Il (est Celui qui) unit les choses opposées, qui associe les choses distinctes, qui rapproche les choses extrêmes et sépare les choses proches, Il n'est enfermé dans aucune définition et Il n'est évalué par aucun calcul. Il ne donne pas prise aux estimations pour le déterminer, et les intelligences ne (parviennent pas à) se Le représenter en imagination pour Le concevoir. Il ne varie pas sous l'effet d'un état transitoire, et Il ne se modifie pas dans la multiplicité des états. Il ne change pas et Il ne cesse pas, Sa disparition est impossible.

Gloire à LUI ! Lui qui est éloigné et proche, qui a un infini pouvoir et une immense bienveillance. Tout ce qui est autre que Lui émane de Sa Générosité (existentiatrice), de Sa faveur et de Sa justice qui donne ou qui retient. Il a parfait le Monde quand Il l'a fait, et Il l'a créé merveilleux quand Il lui a donné l'existence et l'a fait surgir. Nul n'est associé à Sa Royauté, nul ne prend de disposition avec LUI dans Son Royaume. S'Il accorde Sa grâce et répand alors Ses bienfaits, c'est l'effet de Sa Faveur; s'Il éprouve et répand alors Ses tourments, c'est l'effet de Sa justice. Il n'est pas arbitraire dans Son Règne, ce qui Le ferait accuser d'injustice et d'iniquité, et aucune décision favorable à quelqu'un ne saurait être dirigée contre Lui, ce qui Le ferait taxer d'inquiétude et de crainte. Tout ce qui est autre que LUI est sous le pouvoir de Sa Domination et agit (sous l'effet) de Sa Volonté et de Son Ordre. C'est Lui qui inspire aux âmes responsables la piété ou l'impiété, et c'est Lui qui passe sur les mauvaises actions de qui Il veut, ici et au jour de la Résurrection. Sa Justice ne contrôle pas Sa Faveur, et Sa Faveur ne contrôle pas Sa Justice. Il a fait du Monde deux poignées et a créé (pour les hommes) deux demeures en disant : " Ceux-ci pour le Paradis (al janna) et Je ne m'en soucie point, ceux-là pour l'Enfer (al nâr) et Je ne m'en soucie point", sans que personne ne s'y oppose car rien n'existait d'autre que LUI - Majestueuse est Sa Grandeur ! Ainsi tout est sous la libre action de Ses Noms : une "poignée" est soumise aux noms de Son Épreuve, une "poignée" est soumise aux noms de Ses Bienfaits. S'Il avait voulu - gloire à LUI ! - que tout le monde soit heureux, Il en aurait été ainsi, ou (que tout le Monde) malheureux, cela n'aurait pas été grand chose; mais Il n'a pas voulu cela, et il en a été comme Il l'a voulu. Il y'en a qui sont malheureux et il y'en a qui sont heureux, ici et le jour du Retour à DIEU. Il n'est pas possible de modifier ce qu'a décidé l’Éternel, alors qu'Il a dit au sujet de la prière : " Elles sont cinq et elles sont cinquante; la Parole ne change pas chez Moi et Je ne suis pas injuste envers les serviteurs, pour agir librement dans Mon Royaume et exécuter Ma volonté dans Ma Royauté."
C'est une vérité à laquelle sont aveugles les regards et les intuitions, et que ne découvrent les pensées et les consciences que par un don Divin et par générosité du Miséricordieux pour le serviteur à qui DIEU a manifesté Sa Sollicitude et pour qui cela a préexisté lors de sa présence au Témoignage principiel. Il a su alors, quand cela lui a été enseigné, que c'est la Divinité (al-ulûhiyya) qui a présidé à la répartition des destinées, et c'est l'un des secrets de l’Éternel. Gloire alors à Celui qui est tel qu'il n'y a en vérité d'autre agent que LUI et nul existant pour Soi si ce n'est LUI ! " alors que DIEU vous a créés, ainsi que ce que vous faites", et " Il n'est pas interrogé sur ce qu'Il fait, tandis qu'eux sont interrogés", " et à DIEU appartient l'argument péremptoire. S'Il avait voulu, Il vous aurait dirigés tous."

Vers:
Le coeur de l'unitaire vit dans la familiarité de la "croyance au DIEU unique", la racine de la Foi y est plantée.
Ses fruits en sont la science, et l'approbation Divine en est le gardien, bienheureux celui qui est gardé par l'approbation Divine !


Vers:
La lumière est venue à toi, prends-là donc et ne t'arrête pas au parchemin !
Car celui à qui l'or a apporté son éclat fait peu de cas de ce qui est écrit avec l'encre.
Préoccupe-toi donc de la description de la Divinité et regarde-la, unique, dans l'isolement :
Ecoute-bien quand tu es appelé et purifie tes paroles quand tu appelles.
Revêt pour ton Maître un habit de pauvreté pour obtenir la faveur du Donateur (al-Wâhib) généreux !
Et dis, si tu viens à LUI en pauvre : Seigneur, dont l'amour est mon soutien,
verse la boisson de l'Union à un amant ardent qui n'a cessé de se plaindre de la soif de la séparation, égaré longtemps sans lumière, car il ne voyait que les serviteurs !
Sois alors pour Lui la lumière tant que continueront ses quelques jours illusoires,
jusqu'à ce que meure l'Ennemi, impuissant, et que s’éteigne la braise de l'éloignement !
Les hommes seront dans l’étonnement devant un personnage guidé dans la bonne voie après l'égarement.
Celui qui était mort et qui est devenu vivant est dès lors au-dessus des distances.
Celui qui connaît la Vérité (al-haqq) par une connaissance savoureuse, ne mêle plus l'errement à la rectitude.
Celui à qui le Bien-aimé apporte une révélation ignore le plaisir du sommeil.


source : la profession de foi - Ibn'Arabi (traduit par Roger Deladrière)



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